L’année 2020 a mis à dure épreuve le bien-être des professionnels de tous secteurs d’activité. Nous avons eu la chance d’en parler avec un spécialiste du domaine : Timothée Babled, président fondateur de Kalivi, un cabinet RH expert en qualité de vie, qui propose aux entreprises des formations (certifiées DATADOCK) pour prévenir les risques professionnels.

Parlez-nous de votre parcours et de la mission de Kalivi.

Avant de fonder Kalivi, j’ai travaillé plus de 10 ans chez Sodexo, en tenant différents rôles au sein du département marketing : de chef de projet (junior et senior) jusqu’à directeur marketing de la filiale en Chine. Depuis 2019, j’ai fondé Kalivi, qui propose des formations sur la qualité de vie et le bien-être au travail.

Nous avons commencé notre activité auprès du personnel employé par les établissements médico-sociaux, ce qui n’était pas une mince affaire au vu du contexte sanitaire. Les conséquences du COVID dans leur métier ont été très lourdes, et nous avons compris qu’un préservant la santé mentale et physique du personnel, le bien-être des résidents en bénéficierait aussi. En effet, les études scientifiques montrent qu’en agissant sur le bien-être et la qualité de vie des employés, on agit sur leur engagement, et on améliore leur performance. Les données parlent d’une augmentation de 20-25 % de la productivité, et d’une baisse de 48 % de l’absentéisme.

La France sort tout juste du deuxième confinement, et est actuellement sous couvre-feu. Comment intervenez-vous en ce moment ? En présence ou en télétravail ?

Entre les deux confinements, nous avons pu intervenir en présentiel. Ensuite, il a été impossible de se rendre dans les entreprises, et nous avons donc continué notre travail à distance. Cependant, notre métier se déroule plus facilement en présentiel : nous nous adressons à des personnes qui ont vécu quelque chose de très dur suite au COVID (au travail ou en famille). Si la personne a l’air timide, en présentiel, nous pouvons plus facilement l’aider à exprimer ses émotions, pour qu’elle se livre plus facilement.
À distance, actuellement, nous accompagnons des directeurs proches du burn-out, qui sont tellement pris par leur travail qu’ils oublient, comme beaucoup, d’écouter les signes que leur corps leur envoie. Jusqu’au point de nier ces alertes (le mal au dos, par exemple).

Quels outils utilisez-vous à distance ?

Nous utilisons principalement :

  • Zoom, pour sa qualité vidéo
  • Teams, car certains grands comptes sont obligés de s’en servir pour respecter les normes de sécurité (mais la qualité de l’image est un peu compressée)
  • Une plate-forme de LMS pour publier des articles

À propos de la crise sanitaire et de l’explosion du télétravail : comment s’en sortent les entreprises que vous accompagnez ? Quel est votre ressenti ?

Employeurs et DRH nous confirment que les équipes sont saturées des visio (l’excès de réunions se manifeste même à distance). On sent le besoin de se retrouver en physique. En revanche, le COVID ainsi que les enjeux climatiques nous invitent à revoir notre mode de fonctionnement : je suis persuadé que l’avenir est au blended-learning. Nous enseignons ainsi des modules théoriques à distance, et ensuite en présentiel. Nos animateurs évoquent avec les stagiaires des cas concrets, et ces derniers mettent en pratique ce qu’ils ont appris à distance.

L’interaction et la collaboration ont-elles un rôle dans vos formations ?

Oui, un rôle très important même. Au début de notre activité, avec les DRH, nous avons décidé de tester s’il serait pertinent de mélanger non seulement les différentes fonctions (du même niveau hiérarchique) au sein d’un établissement, mais aussi le personnel de différents établissements.

Résultat ? Les salariés préfèrent à 100 % les deux types d’échanges : ils apprennent ce qui se passe dans les autres établissements, ils échangent les bonnes pratiques. La force du groupe, c’est l’échange. Et notre force chez Kalivi, c’est de faciliter cet échange, et d’orienter le groupe pour que les participants bénéficient au maximum de nos formations dans leur vie quotidienne.

Qu’est-ce qu’un outil de formation idéal devrait permettre de faire, pour l’usage que vous en faites chez Kalivi ?

Justement parce que nous croyons que la force du groupe est l’échange, notre formation n’est efficace que si les stagiaires se l’approprient, et s’ils la rendent captivante par leur participation. Cela nécessite de petits groupes de moins de 12 personnes. Pour moi, l’outil de formation idéal doit avant tout favoriser cette interactivité, donner davantage la parole aux stagiaires, à leurs retours d’expérience, à distance comme en présentiel. Pour cela, il faut aussi que l’outil soit facile à prendre en main par les intervenants… Nous sommes très impatients de commencer à utiliser Widactic, car tout ce que je viens d’évoquer semble bien correspondre à sa marque de fabrique !

Vous avez vécu deux ans et demi à Shanghai, en qualité de directeur marketing Sodexo en Chine. Qu’avez-vous retenu de cette expérience ?

Ce qui m’a tout de suite impressionné, cela a été la productivité des Chinois, la rapidité de mouvement avec laquelle ils sont capables de réorienter toute l’entreprise vers le dernier sujet jugé prioritaire.
Plus spontanément que chez les Occidentaux, les Chinois ont un sens inné de l’entraide : peu importe ce qu’on leur demande, ils vont trouver un moyen d’aider, soit en faisant eux-mêmes, soit en activant leur réseau.
En revanche, à l’époque, au sein de mon entreprise, j’ai perçu que les directions raisonnaient moins à long terme que j’en ai eu l’habitude en France. Ce qui a créé une grande fatigue chez certains de mes salariés. Le stéréotype du Chinois qui dort dans le métro ou qui fait la sieste sur son clavier entre midi et 14 h, c’est une réalité ! Si on considère aussi que le management est parfois trop directif, on comprend pourquoi le stress est à l’ordre du jour. Pour la Chine, le défi à l’avenir ne sera pas la croissance, mais la gestion de la qualité de vie des Chinois. Un beau défi pour eux !

Propos recueillis par Laura Mattiucci