Malgré le fait que son nom ne résonne plus aux États-Unis comme celui de Marilyn Monroe, Hedy Lamarr a été considérée comme « la plus belle femme au monde » à son apogée dans les années 40.
Elle aurait dit : « n’importe quelle fille peut avoir l’air glamour, tout ce que vous avez à faire est de rester immobile et de prendre un air idiot ». Mais si Hedy Lamarr savait être glamour, ses idées scientifiques nous prouvent qu’elle était tout sauf stupide !
Car en réalité, derrière la vie chic et charmée d’une vedette de Hollywood se cache une mathématicienne innovante qui a crée le FHSS (Frequency Hopping Spread Spectrum).
Hedy Lamarr est peut-être absente de nos souvenirs cinématographiques, mais si à bord de notre voiture nous programmons une destination sur notre GPS, nous nous raccordons au réseau WiFi, utilisons notre téléphone portable ou nous connectons en Bluetooth, c’est bien grâce à Hedy Lamarr.
Oui, notre GPS vient des coulisses du cinéma des années 30-40 !
Voici la petite histoire de Hedy Lamarr.
Née Hedwig Eva Maria Kiesler en 1914 en Autriche, la jeune femme n’a que 20 ans lorsqu’elle commence une carrière d’actrice pour aider financièrement ses parents.
Remarquée pour sa beauté, elle joue en 1933 dans le film Extase. La jeune Hedy Lamar y interprète alors son rôle le plus connu et le plus scandaleux. Pour la première fois sur grand écran, une femme apparaît non seulement nue, mais simule un orgasme. Eh non, Kim Kardashian n’était pas pionnière, dans ce domaine aussi, Hedy avait un temps d’avance !
Ce rôle sulfureux ne quittera jamais la carrière de Lamarr qui se retrouvera dorénavant enfermée dans des rôles de femme fatale. Mais son visage inspirera aussi bien la méchante Catwoman que la jeune femme sage, Blanche Neige.
Après Extase, elle épouse Friedrich Mandl, un marchand d’armes prolifique. Bien que malheureuse en ménage, Hedy Lamar côtoie le monde militaire par le biais de son mari. Cet épisode est déterminant dans sa vie puisque ce sera lors de longues conversations autour des missiles radioguidés qu’elle donnera naissance à son invention visionnaire.
Dans ces soirées mondaines, Lamarr avait pris connaissance des technologies de différentes armes, dont celles des systèmes de contrôle de torpilles.
En 1937, Hedy Lamarr décide de quitter son premier mari dans une fuite digne d’un scénario de cinéma. Elle prend la direction de Hollywood où elle va rencontrer les plus grands réalisateurs et les plus grands acteurs de son époque. Passionnée de design et grande bricoleuse, Hedy Lamarr ne pouvait pas se satisfaire d’une vie de vedette. C’est Howard Hughes qui lui donne l’occasion d’utiliser ses laboratoires scientifiques. Elle en profitera pour révolutionner les feux de circulation et les ailes des avions. Cependant, ce sera sa rencontre avec le compositeur George Antheil qui marquera un nouveau tournant dans sa vie.
Avec Georges Antheil, elle va trouver l’idée d’une invention pour mettre fin au torpillage des paquebots de passagers. Il s’agit de la transmission FHSS – Frequency Hopping Spread Spectrum (Étalement de Spectre par Saut de Fréquence). George Antheil était familier des systèmes de contrôle automatiques et des séquences de sauts de fréquence. Il les utilisait dans ses compositions musicales et ses représentations où il s’appuyait sur le principe des rouleaux de bandes perforées des pianos mécaniques.
Lamarr et Antheil se proposent d’aider les Alliés en décembre 1940. Par la suite, ils décident tous les deux le 10 juin 1941 de déposer le brevet de leur invention nommée Secret Communication System ( « Système Secret de Communication »). Le Bureau américains des Brevets (USPTO) détient désormais le brevet du Secret Communication System du 10 juin 1941 — enregistré le 11 août 1942. Il s’agit d’un système de variation simultanée des fréquences de l’émetteur et du récepteur qui dépend d’un même code enregistré. Son idée était de crypter les messages et d’empêcher les sous-marins nazis d’intercepter les messages. Le support utilisé étant des bandes perforées inspirées des cartes des pianos mécaniques. Antheil donne tout le crédit de la partie fonctionnelle à Lamarr, précisant que son travail à lui était simplement technique.
Cependant, cette idée était tellement novatrice que la Marine américaine n’en a pas immédiatement saisi l’importance et la trouvait « irréalisable ». La technique n’était donc pas mise en pratique à l’époque, bien qu’il y a eu dans les années 1950 un projet de détection de sous-marins par avions utilisant cette technique. C’est pour tout cela que Hedy Lamarr n’indiquera même pas cette invention ni le dépôt du brevet dans ses mémoires Ecstasy and Me. Les progrès de l’électronique ont été enfin utilisés officiellement pour la première fois par l’Armée américaine lors de la crise des missiles de Cuba en 1962, puis à la suite pendant la guerre du Viêt-Nam.
En 1959, le brevet tombe dans le domaine public. C’est ainsi que ce dispositif a été utilisé par les fabricants de matériels de transmission, en particulier pendant les années 1980 quand la plupart des téléphones portables mettent à profit les principes de cette invention Lamarr/Antheil.
C’est effectivement ce principe qui est actuellement utilisé pour le positionnement par satellites (GPS, GLONASS…) sans compter les liaisons militaires chiffrées, les communications des navettes spatiales avec le sol, la téléphonie mobile ou encore la technique Wi-Fi et le Bluetooth.
En 1973, les fondateurs de la première « Journée nationale de l’inventeur » publient un communiqué de presse où figure Hedy Lamarr, la femme qui avait rendu les missiles plus furtifs.
Âgée alors de 59 ans, Lamarr en fut surprise, ignorant jusqu’à ce jour que son brevet avait été utilisé. Elle essaie d’en obtenir vainement les droits. Elle n’a jamais reçu de compensation financière pour son invention (estimée à une valeur de 30 milliards de dollars) malgré ses réclamations. Elle ignorait que la législation américaine n’accordait que six années après le dépôt de brevet pour la réclamer, et se voyait souvent encore répondre que son invention n’avait pas servi.
Malgré ses efforts en vain, Hedy Lamarr reçoit le prix de l’Electronic Frontier Foundation américaine pour sa contribution à la société en 1997.
Vivant recluse en Floride et âgée de 82 ans, elle ne se rendra jamais à cette cérémonie, de peur que les gens se moquent de son apparence.
Selon l’historienne du cinéma Jeanine Basinger, Hedy Lamarr « aurait très bien pu devenir une scientifique. C’est une option qui a pâti de sa grande beauté ».
Jusqu’à sa mort en janvier 2000, Lamarr ne cesse de produire des inventions et laisse derrière elle de nombreux projets ingénieux jetés sur papier. Elle devient le symbole de l’innovation et du design à partir des années 2000. En 2003, on célèbre son génie quand elle figure sur la première de couverture de Dignifying Science : Stories About Women Scientists. De plus, un prix autrichien d’invention porte son nom et le 9 novembre, jour de son anniversaire, marque la Journée de l’inventeur dans les pays germanophones.
En 2014, la « plus belle femme du cinéma » et le pianiste George Antheil sont admis au National Inventors Hall of Fame à titre posthume.
Le 11 février devient la Journée internationale des femmes et des filles de science. De tout temps, nombreuses sont celles à avoir œuvré pour la science, mais leur travail n’a été que trop rarement reconnu de leur vivant ou même à titre posthume. Hedy Lamarr a dû attendre 59 ans avant que son invention, un système de codage des transmissions par étalement de spectre, ne soit reconnue. Elle est à l’origine des technologies modernes que nous utilisons tous aujourd’hui comme le Wi-Fi, la téléphonie mobile ou le Bluetooth.
Ses débuts au cinéma l’ont révélée comme une femme d’une beauté époustouflante, et on se souviendra également d’elle comme une femme extrêmement brillante. — Et notre Wi-Fi ne dira pas le contraire !
AMB